Chapitre C2: Essai sur la physiologie de l'explication :
- la structure et le processus, le curriculum et le discours, la sérialité et le parallélisme, la stéréo-présentation-
La vision systémique sur le curriculum, le discours et l'explication
La perception de l'unité systémique a marqué profondément la science moderne. La théorie des systèmes en fait l'étude abstraite. Un système n'est pas une juxtaposition de " parties ". Le comportement de l'ensemble est le résultat global des liens existants. A tout moment le système se trouve dans un " état " qui évolue à la suite des excitations extérieures et de la situation interne. Dans la vie du système, les structures et les processus se conditionnent réciproquement. Dans une optique déterministe, les processus sont déductibles. En négligeant la dimension probabiliste, la finalité et le libre arbitre et en mettant l'accent sur la chaîne cause- effet, le comportement serait implicite, une fois la structure connue.
La science veut déduire le comportement de manière explicite, veut expliquer la physiologie en partant de la morphologie. Le type d'explication visée par l'épistémologie répond au " pourquoi ? ". Elle est " déductive-nomologique " puisqu’on on part des hypothèses et des lois (" explanans ") et on déduit les conclusions (" explanandum "). L'explication peut aussi être " statistique-probabilistique ". Mais l'explication " descriptive-pragmatique ", si souvent utilisée par les hommes pour partager le sens des choses, n'est pas considérée en épistémologie, parce qu'elle répond directement seulement au " quoi ? ", " comment ? " et " quand ? ". C'est l'erreur de l’orgueilleux, car décrire un système complexe et son comportement c'est de transmettre aussi une argumentation implicite, induite partiellement : l'explanandum et l'explanans sont déjà infusés dans la description! Le "pourquoi ?" sera peut être explicité mieux, plus tard. Le mépris pour l'explication pragmatique exprime l'ambition vaine de séparer des causes séparables là où il n'y a qu'échafaudage complexe et unitaire d'interférences...
Si on traduit la structure systémique dans un modèle quantitatif, on obtient un " système d'équations " qui l'exprime. Chaque équation reflète une propriété d'un élément ou d'un lien, une loi du système. Une fois le " système d'équations " établi, des problèmes peuvent être posés. Il reste maintenant à les résoudre... Pour cela on dispose parfois de méthodes globales, qui offrent une solution sans qu'on puisse préciser l'influence individuelle de chaque composante (partie ou lien) sur la solution. Une telle localisation est impossible, car ce qui se passe est l'effet de la combinaison. L'étude de l'oxygène et de l'hydrogène n'est pas suffisant pour décrire l'eau... Il y a encore des gens qui s'acharnent, à la bonne tradition " linéaire ", de résoudre un système d'équations en découvrant les inconnues, une après l'autre... Le mathématicien sait que la solution globale est la seule possible, que l'ensemble détermine sa propre évolution.
Si on applique les principes généraux dans l'étude des systèmes d'instruction, on affronte des problèmes très complexes. Les éléments qui interviennent sont nombreux, hybrides, instables et difficiles à mesurer. Les " lois " (dans le sens des sciences exactes) ne sont pas disponibles. Les paramètres sont ambigus. Les "équations" ne peuvent pas être formulées. Dans de telles circonstances, la méthodologie de l'approche ne peut pas être mathématique, complète, optimale, exacte. Mais, au-delà des difficultés d'un traitement quantitatif, il y a des principes systémiques qualitatifs qui opèrent.
Le fait de saisir que le disciple et le maître (humain ou artificiel) forment un système, nous aide à éviter les réductions. À chaque moment ce qui se passe est le résultat de la " réaction ", de la résonance, de la co-action. On ne peut pas comprendre, estimer ou préparer une " molécule éducative " en observant isolément les " atomes ". On doit analyser son métabolisme global. On tiendra aussi compte de tous les éléments qui influencent le système (cadre extérieur, etc.).
Les acteurs et les sujets de l'explication ont aussi des essences systémiques, des métabolismes internes. Ils représentent des unités qui sont plus que la somme de leur parties, des " molécules " qui sont plus que le mélange de leurs atomes. Un homme n'est pas la somme de ses connaissances. Un savoir n'est pas réductible à une juxtaposition de " briques d'information " car entre les éléments qui le composent, il y a des relations, des influences et des réactions.
Considérons donc la transmission d'un savoir système, complexe, organiquement unitaire. Il pourrait s'agir de " comment conduire une automobile ", " comment fonctionne une automobile ", " comment on dépanne une automobile ", etc. Chaque partie du sujet a son " contenu ", son état, ses dimensions, sa position dans le système global des notions. Chaque lien entre les parties a ses caractéristiques. La structure est plastique, vague, fluide. Le métabolisme de l'ensemble des notions est déterminé par les composantes, par les liens, par les influences externes, par l'inertie, par " la topologie évolutive " du système conceptuel. Comment peut-on reproduire une telle morphologie?
Si on tient compte du fait que la construction se fait dans l'espace du savoir de l'apprenant, que le sujet doit se développer autour de ses connaissances préalables sous la pression de sa motivation et en fonction de ses caractéristiques intellectuelles, le problème se complique encore. Comment l'apprenant bâtit un nouveau savoir? Comment arrive-t-il à construire le nouveau concept-système, du moment qu'il doit procéder par étapes (tranches), qu'il doit ajouter successivement des éléments, tandis que l'ensemble final est cohérent dans son unité globale ?
La modularisation et la recomposition; le curriculum et le discours; l’analyse et la synthèse
Pour comprendre, manipuler ou construire des systèmes complexes, l'expérience humaine à exploité l'idée salutaire de la modularisation. On décompose le système dans des sous-systèmes (parties) qu'on analyse séparément. On étudie le " couplage " (relations, dépendances) entre les sous-systèmes. Le processus continue de manière récursive et établit une " hiérarchie " structurelle. Cette procédure fondamentale pour la gestion de la complexité répond à une nécessité et établit un compromis entre la précision et la mise en pratique. Il est d'autant plus efficace qu'il est naturel.
Le succès de la modularisation dépend de plusieurs facteurs :
- La pertinence : les parties de la décomposition ont une unité fonctionnelle ; elles ne représentent pas un groupage arbitraire. (L'organisme est divisé en organes, les organes en tissus, les tissus en cellules, les cellules en molécules, les molécules en atomes). Pour un savoir la pertinence de la décomposition, même relative, est très importante.
- La " séparabilité " : les parties qu'on isole doivent pouvoir être étudiées séparément ou, pour le moins, l'influence des autres parties doit être facilement estimable. On ne va pas séparer une partie dont le fonctionnement est influencé par une multitude de mécanismes extérieurs dans une multitude de " points de contact ". Pour la décomposition d'un savoir complexe, les modules devraient être compréhensibles sans trop de " références croisées ".
- La flexibilité : des modifications raisonnables permettent d'accommoder les petits changements de l'ensemble. Si, par exemple, le curriculum évolue, il est préférable que les modifications nécessaires opèrent au niveau de chaque partie, sans entraîner une révision de la structure globale.
Dans la technologie actuelle, ces critères sont devenus des normes. On a renoncé aux appareils électroniques à un seul bloc et on a passé au design " par modules ", car le contrôle du monobloc était difficile. On travaille mieux avec des " modules " (parties) dont on connaît les fonctions extérieures (des " boîtes noires "). L'industrie du software connaît la même réorganisation (" programmation par objets ").
Si on essaie de transposer cette technique dans l'ingénierie du savoir, on constate des particularités et des limites. Un aspect important qui apparaît est la relation dialectique entre la décomposition qui tient de la logique interne du sujet et la décomposition pédagogique. Il y a une différence entre la structure du sujet organisé progressivement par une science et l'évolution du même sujet dans une conscience.
La notion de " sujet " nous place d'ailleurs en pleine ubiquité! De quel objet parle-t-on? Du savoir de l'apprenant, du savoir de l'éducateur ou du savoir abstrait et partagé enregistré dans la science? Une analogie possible serait celle de la perception des couleurs. On peut parler de la couleur comme sensation d'un récepteur. Mais on sait que cette réaction subjective, heureusement similaire pour la majorité des gens, est provoquée par la distribution spectrale des rayons électromagnétiques visibles. On peut parler de " couleur externe " qui est cause et de couleur " interne " qui est effet.
Les cognitivistes insistent sur le volet intérieur du sujet comme vrai but de l'éducation. Les béhavioristes se baseront sur la forme extérieure pour objectiver et synchroniser le savoir. Continuons dans l'hypothèse de la simultanéité de ces dimensions. Au lieu de forcer une organisation unique, nous devons accepter que les décompositions scientifique et pédagogique aient chacune leur sens et leurs formules et qu'elles se complètent.
Pendant l'apprentissage, la construction des connaissances se fait dans l'espace intellectuel de l'apprenant. Il n'est pas opportun de lui proposer des solutions correctes mais artificielles du point de vue cognitif. Sur une plaque électronique on peut monter toutes les pièces nécessaires et établir seulement à la fin les liens qui les englobent. Sur la " plaque cérébrale ", de telles constructions ne sont pas possibles! Le savoir interne s'établit progressivement, chaque étape doit être acceptable pour l'apprenant On ne peut pas lui demander d'attendre la compréhension finale, d'un seul coup! Pour l'explication d'un sujet nous devons trouver une décomposition non seulement plausible, séparable et flexible mais aussi accessible, car le but de la décomposition est d'assurer la reconstruction du sujet par compréhension et apprentissage. Le " filtre de réception des informations " avec ses capacités limitées produit des restrictions qui déterminent la stratégie du discours.
Le rapport entre le curriculum et le discours est plus compliqué qu'on le reconnaît d'habitude. Le discours est un traitement sériel spécial d'un sujet, qui peut refaire une structure conceptuelle parallèle, qui régénère éventuellement un curriculum mais qui utilise un filtre d'organisation spécifique à son propre contenu. Il combine des informations-buts avec des éléments nécessaires pour assurer la compréhension facile et progressive, il contient des détails utilisés de manière transitoire qui ne se retrouvent plus dans le concept stabilisé! Le discours raffiné ne s'établit pas par simple concaténation des parties d'un curriculum décomposé. La lecture (l'écoute) déclenche un processus cognitif spécifique qui dépend de manière très fine de la composition du discours. Plusieurs plaidoyers expliquant un même sujet peuvent nous offrir par intégration une vision dense sur lui.
Le " curriculum " est une abstraction utile pour la science, c'est un dénominateur commun entre plusieurs discours qui pourraient traiter un sujet. D'habitude, le discours qu'on appelle " curriculum " est organisé sur une logique plus près de l'essence du sujet en soi. Il est expliqué aux apprenants avec des discours secondaires, qui en appellent à la rhétorique pédagogique.
Ayant sa propre structure, le discours pédagogique peut faire l'objet d'une analyse à part et parfois cette opération est intéressante. Par exemple un apprenant peut suivre au début synchroniquement une présentation, dans son rythme naturel et puis, l'explorer librement de manière asynchrone. Cette possibilité de " dissection " du transitoire, fait la force du message écrit.
Pour comprendre (apprendre) un sujet complexe, l'apprenant doit combiner l'analyse (décomposer pour arriver à des " granules comestibles ") et la synthèse (refaire l'unité de l'ensemble avec les " cellules " comprises), dans un cycle en spirale. On ne peut pas décomposer tout au début, apprendre chaque partie et assembler à la fin. A chaque moment l'apprenant développe une image interne partielle mais cohérente en ajoutant synthétiquement les nouveaux atomes qu'il extrait par analyse. On est habitué avec cette performance, mais elle est tout à fait remarquable! Si on accepte que le savoir-complexe est un système et non pas un ensemble de savoirs-parties, on doit reconnaître que le mécanisme de l'analyse-transmission-synthèse est très subtil. On peut préciser le moment de la transmission de chaque partie mais, quand a-t-on transmis les liens qui recomposent l'unité systémique? Si la réponse est " jamais ", on arrive à la conclusion que le métabolisme de l'ensemble apparaît automatiquement par la rencontre de ses éléments, comme une réaction chimique. Mais la théorie et l'expérience pédagogique suggèrent plutôt qu'il y a une infusion continuelle, parfois explicite, " d'énergie de synthèse " qui soutient l'évolution permanente du modèle mental.
Quoique l'analyse et la synthèse interfèrent inextricablement dans le processus de recomposition d'un savoir, leur pondération n'est pas symétrique. Quand la synthèse suit de près l'analyse, elle est plus facile à gérer. Mais en général il est plus difficile de former un système par intégration que de le décomposer. Le professeur doit comprendre la position délicate de l'élève. Le découpage d'un " puzzle " et sa restauration ont des niveaux différents de difficulté. Il n'est pas surprenant que les " environnements d'aide à l'apprentissage " soient généralement axés sur l'analyse. La synthèse est compliquée, relative, ouverte, créatrice, difficile à instrumenter.
Comment assister quelqu'un qui est en train de construire un savoir-système ? On peut l'aider certainement (pour refaire un puzzle, la consultation de l'image initiale s'avère très utile). Mais quelles sont les règles de l'aide? Pour les trouver, il faut bien comprendre la physiologie de l'explication.
L'évolution du savoir entre le parallélisme et la sérialité
Le savoir intérieur ou le savoir extérieur prennent forme par accumulation successive, par évolution. Un système de connaissances n'est pas la somme de ses parties, mais le résultat de ses transformations, la dernière étape de son histoire. Dans ces conditions il est naturel de se demander si la recomposition d'un savoir doit se faire par la concaténation des parties considérées dans leur forme finale ou par " croissance " suivant une évolution à partir d'un " embryon ".
Le sujet extérieur (le curriculum) a connu une évolution, une transformation. Peut-on négliger son histoire si on veut l'expliquer? On a toutes les raisons d'en douter parce que les idées ont une dimension temporelle. Elles ne sont pas réductibles à leur forme présente. L'observation présente d'un sujet ne suffit pas toujours pour le comprendre... et peut être même pas pour le définir complètement! L'histoire des sciences participe à leur signification et imprègne leur métabolisme actuel.
L'évolution d'un savoir " interne " (vivant dans la cognition d'une personne) a une autre physiologie. L'histoire des préalables compte toujours (la dimension intégrative) mais le régime transitoire (la dimension dynamique) devient essentiel. Si apprendre est de faire croître un savoir interne et non pas de calquer le savoir extérieur, le discours pédagogique devra suivre une logique transitoire. La recomposition visera une histoire accélérée. A chaque moment, l'apprenant développe sa connaissance-système évoluante. Il faut tenir compte pour l'aider à la recomposition de la dimension temporelle, de l'ordre de l'enchaînement et de la capacité cognitive momentanée de traitement.
Pour décrire le savoir extérieur ou le savoir intérieur en évolution, on peut parler des systèmes de connaissances concernant les notions et les relations entre elles, etc. La granulation du curriculum opère dans l'espace (une décomposition en parties) mais la transmission des granules se fait dans le temps. Il s'agit d'une " sérialisation " des informations parallèles. Le récepteur doit pouvoir capter les éléments de la série et les réintégrer dans une structure. Si on se place entre l'apprenant et son partenaire et qu'on applique une section imaginaire dans le " canal de communication " qui les lie, la " surface " sera traversée par des " signaux " ou des " messages ". La séquence des notions découpées du curriculum qui est aménagée pour être transmise forme une sérialité-cause. Le " film " de l'évolution interne du savoir enregistre une sérialité-effet. Dans le langage des télécommunications, un signal (message) émis provoque un signal (message) reçu. Au-dessous de ça, une structure engendre une autre structure, au cours d'un processus. Le savoir-système se multiplie par décomposition-recomposition
La construction du savoir est facilitée si à tout moment l'ensemble des notions assimilées est compréhensible et l'ajout s'encadre de manière cohérente dans le système déjà existant. L'apprenant doit avoir une attention distributive pour percevoir le détail qui s'ajoute (et sur lequel son attention est focalisée) et en même temps l'ensemble où ce détail s'intègre. Il doit ne pas perdre de vue la simultanéité des éléments qui donne le sens du système, pendant qu'il suit l'alternance explicative.
Les études psychologiques démontrent que, pour réaliser cette performance, l'apprenant met en action des stratégies de coordination spécifiques, exploite des mécanismes propres à sa pensée, qui sont plus ou moins performants. Un exemple suggestif au niveau de la perception est l'organisation de la vue. La tache jaune permet la vision précise des détails " balayés " par l'attention, tandis que le reste de la rétine surveille le fond. A tout moment les deux visions coexistent et interagissent. Le jeu " global-détail " a des racines profondes. Au niveau de la mémoire, les modifications sont opérées par des mécanismes encore peu connus, mais en tout cas capables d'intégrer la simultanéité et la succession. La " mémoire à court terme " ou la " mémoire de travail " contribuerait à cette dualité.
Nous retrouvons ainsi un problème pédagogique classique: dans quel ordre faut-il transmettre les éléments du savoir extérieur décomposé pour faciliter la recomposition intérieure? Si le savoir à apprendre permet une décomposition linéaire, la solution est relativement simple; on transmettra les morceaux, l'un après
l'autre, en livrant à chaque étape le contenu d'une partie et les liens pour l'englober dans l'ensemble déjà
appris. Mais si le savoir-système n'est pas linéaire ou recomposable linéairement, on est obligé de trouver d’autres solutions. On pourrait revenir sur nos pas pour compléter ou modifier des descriptions faites antérieurement, révéler à posteriori des significations, présenter des variantes et de nouvelles interprétations.
Il est assez rare que la structure d'une connaissance déclarative soit linéaire. Les notions forment pour le moins une hiérarchie. Pour présenter une structure arborescente, nous sommes obligés à des ramifications. On suit une branche, on revient pour suivre l'autre. Quand les " nœuds " sont liés par de multiples liens, les boucles apparaissent et la topologie devient celle d'un réseau. Pour les connaissances procédurales, seulement les cas simples sont solubles par une approche en cascade (" étape après étape "). On rencontre souvent des branchements (des alternatives) ou des itérations (on reprend des opérations). Pour les connaissances démonstratives (des explications sur des liens de causalité), le mécanisme linéaire reflète les cascades " cause et effet ". Si par rétroaction, l'effet agit sur les causes (réaction), on se trouve déjà en face de la boucle. Les structures de cascade, de ramification et de boucle, sont des vrais " briques " pour le design explicatif. Si la réalité n'est pas linéaire, on applique des procédures de " linéarisation ", car l'argumentation en cascade présente l'avantage d’être opérationnelle. Elle est un outil épistémologique et pédagogique important, mais elle n'est pas suffisante pour l'explication des processus complexes.
Prenons l'exemple élémentaire d'un ensemble condensateur-bobine. Si on doit expliquer (enseigner) le phénomène de l'oscillation, on se trouve dans une situation irréductiblement circulaire. Le vrai mécanisme s'explique par l'interaction entre les deux composantes! On peut commencer l'explication d'un point de la boucle, pour la " traverser ". Cela est beau et suggestif, mais n'est pas vrai! L'oscillation ne commence pas à cause du condensateur, ni de la bobine, elle est conditionnée, générée par leur co-présence.
La boucle est une entité en soi, à grand potentiel générateur, insoluble par division en parties. Pour expliquer des réalités circulaires, on peut utiliser des " explications circulaires ", qui enrichissent le monde des phénomènes explicatifs non-linéaires. L'explication comme procédure n'est donc pas toujours une cascade. Elle branche, elle revient, elle flâne, elle s'égare, elle se corrige. Si on pense aux restrictions sérielles du canal de communication, on redécouvre la difficulté : comment transmettre des savoirs qui ne peuvent pas être disposés de manière linéaire, avec une rhétorique non- linéaire, par des canaux sériels de communication?
Dans l'utilisation du livre, cette difficulté a été déjà rencontrée. Les créateurs ont expérimenté des solutions (index, annexes, références croisées) pour dépasser la linéarité de la lecture. Le sentiment d'insuffisance du discours sériel s'est accentué dans le temps. Des visionnaires comme Nelson ont imaginé la documentation hypertextuelle pour dépasser la linéarité. Les environnements d'assistance informatisée promettent des solutions nouvelles au problème de la transmission des savoirs-systèmes. Ils permettent des combinaisons flexibles entre l'expression parallèle et sérielle du message explicatif, mais ils posent le problème difficile de la gestion des décisions.
Pour concevoir l'aide à l'apprentissage d'un savoir-système, un problème qui est particulièrement critique est de savoir qui doit diriger les " opérations ", l'apprenant ou son assistant? Il y a une contradiction à dépasser. D'abord l'éducateur sait comment on peut décomposer le savoir, dans quel ordre, et peut-être même dans quel rythme il faut le recomposer pour optimiser un apprentissage virtuel. Cette connaissance fait partie de son expertise sur le sujet et sa pédagogie; il connaît l'arrivée. Cependant il ne peut pas savoir avec précision la réaction de l'apprenant; il n'est pas sûr que dans un cas particulier les hypothèses sur lesquelles se base son discours soient vérifiées. Il ne connaît pas le point de départ du savoir interne à faire évoluer. Ensuite, l'apprenant est le seul expert et observateur direct de son savoir réel, l'acteur témoin des opérations de réception, d'analyse et de synthèse qui mènent à la recomposition du sujet. Il connaît le départ et perçoit les états intermédiaires; par contre, le sujet extérieur vers lequel il doit s'orienter lui est inconnu; il ne connaît pas l'arrivée.
Dans ces conditions, qui doit décomposer le sujet en parties jusqu'à la granulation nécessaire à une bonne transmission? Qui doit décider l'ordre de la série transmise? Qui doit contrôler la transmission proprement dite? Qui doit gouverner la recomposition? La réponse varie d'un cas à l'autre. On peut songer à des formules flexibles.
Le béhaviorisme a favorisé des présentations " algorithmiques ", des chaînes explicatives bien déterminées, indiquant à l'apprenant la voie de recomposition nécessaire pour retrouver le sens global. Le succès de telles méthodes ne doit pas être éludé, mais les limites sont aussi évidentes. Il faut réaliser un " synchronisme " entre la suite explicative et le récepteur. Pensons seulement à la culture de l'apprenant, pour saisir la fragilité de la situation. Les individus habitués à être dirigés seront perplexes en face de trop de liberté de choix. Par contre, les " autonomes " se sentiront étouffés par un partenaire directif.
L'approche cognitiviste conduit à une autre politique de décision. L'alternative au dirigisme est la liberté. On offre à l'utilisateur le savoir- système, tel qu'il est. On ne l'explicite pas par un discours, car l'auteur a peu de chances de deviner les particularités du mécanisme optimal d'apprentissage. On offre la globalité parallèle et des outils pour extraire des composantes (éléments, liens, propriétés, etc.) L'apprenant conduit sa propre démarche de décomposition- recomposition. Tout au plus on peut l'assister, pour lui donner des conseils. Le savoir se développe de l'intérieur, par ajouts, il n'est pas introduit, " écrit ".
Les risques d'une telle approche sont l'égarement et le parcours inefficace. Il y a des situations où ce n'est pas la création qui doit être facilitée mais la compréhension rapide et correcte d'un savoir standard et on a intérêt à piloter la recomposition, à offrir une " voie royale ". Une telle voie est utile surtout en sciences exactes, quand il faut transmettre une structure univoque et claire. L'univers des connaissances de l'apprenant est important pour la compréhension mais le savoir à transmettre a sa propre structure, son propre " métabolisme ", sa propre formule de croissance. Les composantes doivent être ajoutées dans un ordre rigoureux pour permettre la reconstruction correcte. Laisser l'apprenant découvrir cet ordre ce serait de l'obliger à un effort inventif peu justifié. On doit plutôt l'orienter sur le chemin lui permettant de comprendre bien et facilement. On doit lui expliquer ce qui se cache de manière implicite dans la totalité à laquelle il est confronté.
Dans pareils cas, il ne résulte pas que le style linéaire de présentation (en cascade) soit suffisant et que les relations interactives ne sont pas nécessaires. Au contraire, même dans l'alternative d'une explication discursive, le présentateur (présent ou représenté par un instrument) doit aider l'apprenant à gérer continuellement le processus complexe qui lui permet de comprendre, de distribuer son attention entre la sérialité et le parallélisme, la structure et le processus, l'analyse et la synthèse....
L'apprenant a besoin de stratégies opérationnelles pour résoudre la vision duale (le détail et l'ensemble) dans toutes les situations (de cascade, de branchements, de boucles, etc.). Il faut mettre au point de bons instruments pour aider le " récepteur d'une explication " à pouvoir la suivre, l'adapter à son rythme, la contrôler directement ou avec l'aide du partenaire. On peut exploiter les possibilités de l'ordinateur dans cette direction. . On peut exploiter les possibilités de l'ordinateur pour assurer l'ambivalence de l'environnement d'assistance en expliquant mais aussi en permettant l'exploration.
Que peut-on donc faire pour faciliter la recomposition d'un sujet complexe? Nous pouvons chercher dans plusieurs directions:
1. Clarifier le métabolisme du sujet et la logique de son explication. Quelle est la décomposition favorable? Doit-on respecter une logique interne propre au sujet, refléter plutôt son histoire ou recourir à un aménagement pédagogique. Jusqu'à quelle granulation peut-on continuer la fragmentation? Quels sont les liens entre les modules à chaque " niveau de décomposition "? Peut-on " comprendre " une partie sans avoir besoin d'autres? Peut-on trouver " un chemin " qui permette à chaque module d'être compris à l'aide des précédents? Sinon, peut-on retarder la compréhension complète, en vue des précisions ultérieures? A quel moment doit-on faire appel à des retours ?
2. Clarifier les particularités de l'intégration du sujet par l'apprenant. Quelles sont ses limitations cognitives transitoires? Quelles sont ses habilités d'analyse et de synthèse? Quelle est son expérience de recomposition ? Quelle est la granulation qui lui convienne? Quel est le rythme de sa réception? Comment peut-on faciliter la synchronisation du récepteur pour appuyer le décodage de la série éducative émise? Comment peut-on aider l'explorateur à extraire l'information ?
3. Étudier le système sujet extérieur-éducateur-apprenant-sujet intérieur. Comment et pourquoi ce système se forme-t-il? Quelles sont les particularités, les influences extérieures, les critères d'évaluation? Comment équilibrer les conditions des points précédents? Comment organiser la transmission correcte du savoir extérieur pour permettre au savoir-intérieur de croître par ajouts?
En répondant à ces questions on peut organiser l'assistance, de plusieurs façons:
1. La préparation du savoir. Pour l'autodidacte, on peut " aménager " le sujet extérieur de manière à ce qu'il soit facilement abordable. On choisit une bonne modularisation, que l'on raffine jusqu'à la granulation nécessaire. On présente une " carte " de la décomposition faite, de manière à mettre en évidence la position des parties dans l'ensemble. On explicite les liens entre les parties. On décrit le fonctionnement de l'ensemble à plusieurs niveaux de décomposition (raffinement successif). L'ordre et le rythme de la lecture sont fixées par l'apprenant.
2. La présentation du savoir. Si on a réussi à découvrir une " voie royale " pour la recomposition du sujet, on présentera cet enchaînement qui assure le transfert progressif de la connaissance-système. Cela suppose que la " série " émise respecte à la fois les exigences du savoir extérieur et les particularités de l'apprenant. Chaque nouvelle tranche est facile à recevoir, intelligible, facile à intégrer dans la structure interne, de manière à faire évoluer correctement le savoir interne. L'ordre est fixé par l'éducateur (l'auteur de la leçon), avec des libertés laissées pour certaines adaptations. Le rythme par exemple, peut être fixé par l'apprenant.
3 La fusion du savoir. Supposons que le système ne peut pas être expliqué par enchaînement. Les parties sont inséparables, les liens sont complexes, la décomposition est artificielle. Le sens de l'ensemble se révèle globalement, comme une réaction entre les composantes. Pour produire cette réaction, il faut créer un certain contexte intérieur et mettre en jeu des éléments introduits préalablement. Convaincre l'apprenant à assimiler des informations à justification immédiate imperceptible pour permettre une interprétation ultérieure révélatrice, le conduire dans l'état qui rende possible cette révélation, ce sont des opérations délicates qui peuvent réclamer un enseignement plus directif.
4 La synchronisation du savoir. L'apprenant et l'assistant peuvent surveiller une image (un diagramme) de l'état évolutif du savoir de l'apprenant. La synchronisation des deux partenaires se fait à l'aide de cette image- interface. L'apprenant observe l'image que le partenaire se fait sur l'état de la recomposition qu'il est en train d'opérer. Il peut la comparer avec son véritable état intérieur (la boucle de réglage entre le savoir virtuel et le savoir interne) et avec l'image du savoir à atteindre (le puzzle complété, le savoir but. L'assistant peut utiliser les confirmations de l'apprenant pour décider les continuations conformément à la stratégie d'explication préparée (la boucle de validation et la correction externe). Un tel mécanisme convient quand le novice doit recomposer un savoir- système complexe de la manière voulue par l'expert.
La sérialité et le parallélisme
Dans son activité courante, l'homme fait partie des systèmes qui l'englobent une multitude de " personnages " agissant simultanément. La réalité est fondamentalement " distribuée "; elle est la rencontre de plusieurs acteurs en interaction. L'homme subit une pluralité d'influences simultanées, reçoit des messages en parallèle, est souvent impliqué dans plusieurs processus à la fois, est stimulé par plusieurs sources. La conduite d'un véhicule est un exemple. L'activité d'un enseignant, un autre
Le parallélisme opère aussi dans le monde des processus cognitifs. En faisant des exercices de lecture dans une langue étrangère on apprend en même temps du vocabulaire, de la grammaire et peut-être des informations contenues dans le texte utilisé. En utilisant pour la première fois un menu pour trouver un renseignement, on apprend aussi le mode d'emploi. En additionnant 3 et 7 et puis 7 et 3 on prépare aussi le terrain pour la compréhension de la commutativité... On voit que le feu est rouge, on comprend aussi qu'il ne faut pas passer. On comprend pourquoi celui qui précède, a freiné. Une information (un message) peut donc enrichir l'espace des connaissances à plusieurs niveaux (sur plusieurs plans) simultanément. Réciproquement, l'espace des connaissances existantes est un univers d'interprétation distribué. Plusieurs critères sont utilisés en même temps pour traiter un nouveau message. Si l'information se présente sur plusieurs pistes, le récepteur humain peut les traiter de manière préférentielle, alternative ou intégrative. Nos processus cognitifs sont sériels- parallèles. Nous vivons l'espace et le temps. Nous avons la perception et la mémoire.
Les paragraphes précédents ont analysé la relation entre l'essence parallèle des sujets complexes et l'essence sérielle du discours explicatif. On a vu qu'on peut dépasser cette contradiction par un mécanisme de sérialisation et de recomposition. L'apprenant se concentre sur la réception du fil discursif et redistribue les informations à leur place pour refaire la structure parallèle présentée. Le présentateur décompose, série le sujet, émet le discours et guide la recomposition. Ce " balayage " est extraordinaire mais fatigant, même quand des instruments appropriés facilitent la synchronisation. Nous apprenons pendant des années à parler et écrire. Les cartes de visualisation peuvent soutenir directement la vision globale, que le discours sériel recompose avec effort. La force de synthèse des graphiques est si grande, qu'on les utilise même pour représenter des processus, c'est à dire pour visualiser de manière spatiale des décompositions temporelles! Les " graphes de tâches ", les " algorithmes ", les " planifications " sont des exemples qui montrent l'utilité de la " parallélisation d'une série ".
Sur quoi se fonde la capacité d'une carte et d'un diagramme d'appuyer la vision systémique? Elle provient directement du caractère parallèle de la perception imagée. Le dessin parle parallèlement parce que la vue le permet. Le caractère intégrateur du média graphique, complémentaire à la sérialité des textes, a d’importantes répercutions. Il explique le rôle du multimédia et montre que la combinaison texte- graphisme a des justifications très profondes. Depuis toujours les présentateurs humains ont senti le besoin de combiner les messages sériels et parallèles, pour profiter des capacités de la perception humaine. Au-delà de la perception, l'homme dispose de mécanismes intégrateurs au niveau conceptuel, qui lui permettent de percevoir l'unité des systèmes par la fusion des parties.
Quoique la capacité psychologique de traitement parallèle des informations a des limites, elle nous ouvre de nouvelles perspectives sur le rapport parallélisme-sérialité dans l'explication. Il est normal d'exploiter le potentiel de traitement parallèle pour améliorer le processus de transmission des systèmes ou processus complexes. Au lieu d'un discours sur un fil, on aura un faisceau de discours, qu'on voudrait composer de manière symphonique. Le processus " décomposition- gestion sur plusieurs pistes- recomposition " a une physiologie et un potentiel différents de la sérialisation simple. La transmission pluri-piste permet une riche combinaison de parallélisme et de sérialité, que nous pouvons utiliser pour expliquer plus expressivement les structures parallèles dynamiques. Cette idée nous conduira à la " stéréo –présentation ".
Entre le parallélisme existentiel de l'univers extérieur et le parallélisme de son univers conceptuel, l'homme doit opérer des transactions à l'aide d'un mécanisme psychologique parallèle limité. Il dispose de certaines capacités cognitives parallèles. Au niveau de la perception, les sens lui offrent une réception simultanée (images, sons, odeurs, goûts, pressions). Le cerveau est aussi une " machine " à fonctionnement parallèle (voir " parallel processing " et " neural networks "). Pourtant il est bien connu qu'au niveau de la concentration (attention), le traitement de plusieurs tâches cognitives en même temps est fort limité. Il y a quelque part un " rétrécissement " important du flux cognitif (" embouteillage "). Le noyau de l'attention " balaie " successivement l'espace à traiter. Il en résulte une limitation de la capacité de traitement parallèle de l'homme. Comprendre cette restriction, s'arranger pour bien utiliser le potentiel parallèle naturel, voilà une direction fondamentale pour la recherche en explication et pour le design du discours pédagogique multimédia.
La possibilité du parallélisme commence par le fonctionnement des sens. La réception audio-vidéo est un phénomène crucial. C'est en " nommant " les choses visibles, que l'histoire de la communication a peut-être commencée... La perception parallèle de l'image et de la sensation interne d'un mouvement nous permettent de le contrôler. L'appareil auditif réussit un traitement parallèle des signaux sonores. Les deux flux perçus par les oreilles sont utilisés pour le repérage spatial (stéréophonie). Les divers discours entremêlés dans un flux sonore sont séparables. Le résultat est " symphonique " (on entend les parties et le tout). On peut séparer un instrument, une voix, une mélodie. On peut saisir simultanément plusieurs caractéristiques : la hauteur, l'intensité, le timbre.
L'appareil visuel est conçu aussi pour résoudre (et utiliser) le parallélisme. Des millions de récepteurs fonctionnent simultanément et nous donnent la possibilité de transformer la géographie de leur réaction dans un indice sur la forme . Il y a aussi la perception " stéréo ": entre les deux yeux (nous permettant de saisir la profondeur) ou entre la vision centrale et périphérique (nous permettant l'orientation). Une fois les objets identifiés (comme les instruments de la symphonie musicale) leurs opérations sont perçus et compris parallèlement. Plusieurs critères tels la luminosité, la nuance, la saturation, analysés simultanément permettent des signalisations parallèles.
Le " faisceau discursif " (le " stéréo-discours ")
Le désir d'assister l'homme dans l'accomplissement des tâches parallèles ou la nécessité d'utiliser plusieurs pistes pour lui assurer la meilleure combinaison explicative nous poussent vers la conception d'un " stéréo-discours ", c'est à dire d'une démarche explicative à plusieurs pistes. Le design du discours sur plusieurs pistes réclame de:
1 Analyser les motifs pour répartir le discours sur plusieurs pistes; décider les pistes et la distribution du curriculum;
2 Tenir compte des limites de la réception parallèle (la perception, la compréhension, la rétention) et prévoir la distribution de l'attention;
3 Concevoir des mécanismes qui permettent à l'utilisateur de contrôler la réception adéquate pendant la " stéréo-explication ".
Quelques exemples de rapports sémantiques entre deux pistes, A et B, seraient :
1. A et B ont le même contenu mais diffèrent dans leur forme: autre modalité (texte écrit, parole, schéma, film, etc.); autre aspect (grandeur, couleurs, mise en page, etc.); autre angle d'observation;
2. A et B abordent le même problème mais de manière différente: autre point de vue; autre profondeur; autre contexte; autre modèle…;
3. A et B traitent deux messages complémentaires: parties d'un objet unique; acteurs d'un même système; membres d'une classe; étapes d'un processus; aspects d'une réalité; objets d'une comparaison;
4. A et B traitent deux messages liés: parties d'une relation; chaîne cause-effet; représentation et représenté; principe et application; généralisation et exemple; problème et solution;
5. B est une information annexe pour la réception de A: indication sur le fond; moyens d'orientation; message de synchronisation.
Quelques exemples de rapports perceptifs :
1. A et B perçus simultanément: son et image des films ou des diapositives commentées; discours et gestes d'un présentateur humain; signaux marquant les actions des opérateurs;
2. B perçu après A, mais encore sous l'influence de celui-ci: explication sonore suivie de la démonstration visuelle; paroles et écriture sur le tableau noir;
3. A et B perçus en alternance libre: texte et graphique d'une page de publication illustrée; texte à plusieurs colonnes; passage du regard entre diverses parties d'une image;
4. A et B perçus de manière " vibratoire " (l'attention oscille entre les deux donnant l'impression de la perception simultanée): le film et le titrage; les " étiquettes " des " icônes ".
Le rapport temporel de la présentation sur plusieurs pistes ne coïncide pas avec celui de leur réception. Même quand la distribution du discours a été faite prévoyant le potentiel de traitement de l'utilisateur, il n'y a aucune garantie que celui-ci suivra la " voie de réception " présumée. Il est toujours possible (voir probable) qu'à l'occasion de la perception, l'attention se distribue de manière imprévisible. On ne peut pas être sûr que le message a été reçu (saisi, perçu, compris) ni même dans le cas d'une seule piste. Sur plusieurs pistes, le problème de la réception réelle est encore plus délicat.
Il convient d'envisager des moyens pour soutenir la réception appropriée du stéréo-discours, activés par l'assistant ou par l'apprenant. Comment peut s'assurer un acteur expliquant que les pistes sont saisies d'une certaine façon et que les informations sont perçues et comprises, et par la suite, prendre des mesures en conséquence? Comment gérer l'architecture sémantique dans le cas des pistes " alternatives " (au choix) dont l'information n'est pas identique? Comment l'utilisateur peut-il se rendre compte qu'il a perdu des informations placées sur une piste qu'il a négligée? Ce sont autant de questions difficiles pour la gestion du " faisceau discursif ".
Un principe (et un " module ") d'arbitrage devrait faciliter la gestion des fenêtres, permettant la négociation entre divers participants (fabricant, auteur, professeur, utilisateur). Le système explicatif stéréo-discursif devrait tenir compte de la distribution de l'information entre les pistes, de la capacité de perception (attention distributive) et de la disponibilité des moyens techniques, et cela de manière dynamique, pour proposer la solution appropriée à chaque moment.
Pour comprendre, l'utilisateur dispose de plusieurs instruments qu'il utilise parfois en parallèle (livre, didacticiels, etc.). Dans ces cas, de nouveaux phénomènes, problèmes et possibilités de parallélisme apparaissent. Cette dernière étude est encore peu développée.