Ioan Rosca
Observations sur la technologie
éducationnelle
0.
Introduction
a. Points de
départ
Les dernières décennies ont marqué l'apparition, sur
la carte des activités d'apprentissage , de nouvelles situations, de nouveaux
instruments, de nouvelles méthodes, de nouveaux acteurs et finalement de
nouveaux modèles et principes. La formation des travailleurs dans l'entreprise,
l'instruction à distance, les banques de donnés interactives, le hypertexte,
les programmes d'enseignement assisté par ordinateur, les simulateurs pour
instruire, sont autant des réalités qui témoignent clairement : l'enseignement
(dans le sens classique) ne détient plus le monopole des solutions aux
problèmes d'apprentissage.
Mais si pour tout le monde il est évident que, à part
les professeurs et les administrateurs, ont apparu des autres personnages qui s'occupent
de l'instruction, il est moins clair : quel
est le spécifique de l'activité de
ceux-ci, si' il s'agit d'un métier , si ce métier à un nom ,et quel est le
statut de ceux qui le professent. Cette confusion ne peut que nuire aux
spécialistes impliqués . Certaines clarifications étaient nécessaires.
D'autre part on a enregistré de plus en plus
clairement le fait que le système d'éducation traditionnel est en train de
déclarer faillite, c'est à dire de ne plus pouvoir résoudre les problèmes
d'apprentissage de la société moderne. Les palliatives qui essayent de dépasser
la crise ne sont manifestement pas des vraies solutions . Ainsi on est arrivé à
conscientiser qu'il faut trouver des solutions structurellement nouvelles, de nouveaux paradigmes pour l'instruction.
Pour ce qui est du développement général de la science
et de la technologie, elles ont connu des mutations profondes, qui ne peuvent
qu'imposer des changements en conséquence sur la théorie et sur la pratique de
l'éducation. Ainsi, sur le plan
scientifique, on dispose d ' éléments nouveaux sur la psychologie, sur la
manipulation de l'information , sur l'intelligence, sur la méthodologie
générale (systémique ,systématique, modélations, etc) d'organisation du
travail. Cette avalanche de nouveaux
concepts , méthodes, et visions impose une
restructuration de la théorie concernant l'apprentissage.
Pour sa part , le plan technologique
a connu des développements "explosifs" mettant à la disposition des
instructeurs une gamme d'instruments révolutionnaires qui exige des reconsidérations bouleversantes sur le
design de la "leçon".
On vient de parcourir une gamme de motivations
pratiques et théoriques pour l'entreprise de synthèse conceptuelle qui a donné
naissance au regroupement notionnel étiqueté "technologie de
l'éducation". J'ai laissé pour la fin de cette liste le motif que je
considère le plus important et le plus spécifique pour l'apparition du domaine: l'assimilation de la mentalité
technologique en éducation , c'est à dire le choix de l'efficacité comme axe de l'organisation de
l'instruction.
Il était d'ailleurs venu le temps de revoir le
modèle de la leçon libérée de toute restriction
d'optimalité évaluable , du design
éducationnel
"artistique", de
l'administration arbitraire du système d'enseignement, des instructeurs
uniformément appréciés et payés ; en somme de s'attaquer au principe
sacro-saint (męme si tacite) que l'instruction n'est pas évaluable
,qu'elle n'est pas optimisable que par des moyens...d'inspiration. Accepter la possibilité d'une technologisation de l'instruction c'est
de démolir cette résistance à la compétitivité. Et pour y arriver on doit
disposer d'une argumentation solide
Il n'est pas facile de coaguler toutes les tendances
signalées antérieurement pour bâtir une discipline structurée. Il est encore
plus difficile de résumer cette discipline à l'intérieur d'une définition.
D'autant plus que, le processus d'organisation du domaine est en cours, qu'il
connaît une évolution galopante et des tendances variées. Pourtant, à chaque
étape, une définition est absolument nécessaire pour donner possibilité au
repérage , à l'identification , et assurer une cohérence du développement et du
débat afférent.
b. Le
modèle d'engendrement de la définition
Mais quelles sont les qualités requises pour une telle définition?
Elle doit
ętre suffisamment générale pour englober toutes les manifestations qu'elle
veut représenter, offrant au professionnels concernés la possibilité de
l'appartenance.
Elle doit
ętre suffisamment spécifique pour ne pas laisser place à des confusions.
Elle doit
ętre non contradictoire est utilisable en pratique.
Elle doit
ętre acceptée comme étalon.
Elle doit influencer le domaine dans le sens d'un
progrès .
Elle doit faire preuve de flexibilité et de stabilité
dans le męme temps.
C'est n'est pas une tâche facile et on comprend bien
la pluralité des propositions existantes.
Mais avant de me lancer dans la recherche d'une
alternative pour la définition de la
technologie éducationnelle, après avoir analysé les opinions qu'on nous a
présentées comme repère, je sens le besoin d'établir le sens d'une telle
démarche, sa pertinence et ses buts . En somme ,le type de définition qu'on
envisage.
Parmi la
multitude des modèles d'engendrement d'une définition ,il me semble évident
qu'on se trouve dans la situation suivante:
1. On
remarque l'apparition d'un ensemble de phénomènes nouveaux dans la pratique et
la théorie dédiées à la facilitation de l'apprentissage. Une liste peut ętre
dressée.(voir les notes antérieures). On peut parler d'une définition énumérative après cette première étape.
2
On fait l'observation des certains liens entre ces phénomènes , des
certains traits distinctifs, qui peut servir à les regrouper autrement que par
énumération . On met en évidence ces caractéristiques .
3. On
arrivera à une définition synthétique, par
propriétés, du męme ensemble. C'est ce qu'on nous a présenté dans le cours
.
4. Mais
avant de donner un nom nouveau et à enregistrer un nouveau modèle, on doit
balayer la liste des modèles déjà existants ( la grande structure des idées
enregistrées ) pour voir si on ne trouve pas un modèle isomorphe (analogue) ou
si' il n'existe pas la possibilité de réduire la nouvelle réalité à une
combinaison d'autres structures standardisées.
Si on ne le fait pas, on risque la redondance ou la
contradiction. Si cette réductibilité
n'existe pas , on est libre d'enregistrer notre nouveau modèle avec sa
définition.
Mais qu'est ce qu'on doit faire si on constate qu'il existe une réductibilité ,c'est à dire
quand le nouveau concept peut ętre décrit à l'aide des modèles déjà
existants (dans notre cas le modèle de la "technologie" et de
"l'instruction")? Alors on doit se concentrer sur la démonstration de
cette réductibilité , et donner une définition en conséquence.
5.
Indifféremment que le la nouvelle réalité soit oů non réductible aux
anciens modèles, la définition aura suivi un effort de synthèse progressive
(faits/ classes/ structure/ définition/ nom) donnant la possibilité de décrire
l'ensemble des faits en observation par des règles.
Le vrai gain d'un tel effort de synthèse apparaîtra
dans le moment oů, en appliquant les règles établies, on manipulera plus
aisément les faits de départ et surtout si elles produiront des nouveaux faits
utiles qui ont échappé à l'observation directe. C'est la force d'une bonne
conceptualisation: elle part de l'observation de la réalité et s'organise pour
pouvoir y revenir de manière enrichissante.
c. Le
déroulement du travail .
Les points précédents déterminent le parcours de mon
intervention , qui doit ętre vue
comme une ébauche d'argumentation et non pas comme une
démonstration complète. Je me propose en
ce qui suit de :
1. Décrire
une situation typique pour la réalité qu'on veut définir (à la place d'une
énumération exhaustive , un problème et sa solution intuitive .)
2.
Analyser le spécifique de cette situation et montrer le fait de ne pas pouvoir
l' encadrer dans les modèles classiques de l'instruction. Faire ressortir les
traits distinctifs.
3.
Donner la définition par synthèse des propriétés établies.
(jusqu'ici on suit le travail proposé)
4.
Chercher dans l'espace des modèles existants une combinaison qui englobe les
réalités décrites (au point 1) et surprend les caractéristiques établies (au
point 2). Déduire la définition qui respecte
la cohérence avec le système conceptuel déjà existant.
5.
Argumenter que la définition est
efficace, le fait qu'elle permet une meilleure résolution des problèmes
comme celle présentée au point 1.
1. La nouvelle réalité- une situation exemple
Parmi la multitude d'exemples qu'on peut donner sur
cette nouvelle présence dans l'espace de l'instruction qu'on finit par appeler "technologie de
l'instruction" je choisirai une situation que j'ai vécue dans mon
expérience professionnelle. Le souci de respecter les faits, tels que je les ai
connus, peut réduire un peu l'expressivité de mon exemple, mais , étant donné
ma démarche, il est obligatoire. J'espère quand męme qu'il soit une bonne
base de départ.
a. Le contexte
Il existe une tradition dans ma famille pour la didactique.
Mon père a travaillé toute la vie pour mieux organiser l'enseignement de
l'arithmétique au primaire. Il m'a engrené très tôt dans ses recherches. C'est
sans doute le motif pour lequel j'ai développé une sensibilité particulière aux problèmes de l'apprentissage. La
conséquence a été que pendant mes études j'ai eu toujours un double regard sur
les leçons :sur le contenu et sur le déroulement de l'apprentissage. C'est
ainsi que , en terminant la faculté d'Electronique (Iasi-Roumanie) j'avais plutôt
une optique de professeur que d'ingénieur. A la fin des études j'ai été engagé
(1983) comme ingénieur dans l'entreprise "Electronica" de Bucarest.
C'était le plus
grand fabriquant d'appareils électroniques (tv, radio, etc) de Roumanie. Il
détenait le monopole national, et étant donné l'isolation de la Roumanie (
encore en période communiste), le monopole absolu .
La conséquence
majeure était que la production (et surtout la qualité) n'était pas obligée à
suivre la pression d'une concurrence, et se soumettre aux goűts des
consommateurs.
Un autre aspect
significatif était l'absence d'un propriétaire clairement défini (l'état était
une entité assez vague) , d'une gestion individuelle de l'entreprise, d'une
obligation financière ferme de rentabilité.
Il existait un voeu pieux de rentabilité mais la propriété commune et
indivisible, les entrés et les sorties arbitraires (les "cadeaux
généreux" faits par l'état, -par exemple pour le perfectionnement du
personnel- ,ou les prélèvements arbitraires pour "le développement du
pays") annulaient la possibilité du respect d'un principe de rentabilité.
J'ajoute, pour
compléter la description de "l'atmosphère", que les décisions
importantes étaient finalement prises par les dirigeants politiques de
l'entreprise. Il existait évidement un univers de professionnels , formés dans
un esprit technologique , conduits par le directeur technique (
accidentellement un spécialiste de haute
performance). Les décisions courantes
étaient prises par cet échelon technique. Mais , au-dessus de lui , investis
avec des pouvoirs absolus , les responsables politiques pouvaient (et le
faisaient souvent !) détourner les décisions, avec l'effet qu'on peut imaginer.
Car ce qu'il
faut noter sur le principe de base, était
que la sélection des cadres de décision n'était pas la suite d'une
compétition qualitative , mais le prix d'une soumission collaboratrice aux
règles maladives du système .L'application du principe de l'antisélection avait
produit une hiérarchie de décision , pour le moins absurde.
Voilà quelques éléments pour le cadre général.
A l'échelle du pays,
l'entreprise avait un réseau de représentation qui s'occupait
principalement du service, en assurent aux clients le dépannage des appareils
en période de garantie et après cette période. Pratiquement, dans toutes les
villes de Roumanie il y avait une telle "représentance Electronica"
, qui devait résoudre les pannes qui
apparaissaient dans leur région.
Ces centres
(qui comprenaient de un à trente dépanneurs) étaient équipés minimalement pour
se débrouiller, les cas plus difficiles étaient
renvoyés aux trois "compartiments techniques" qui étaient
distribués sur le territoire. Les
"compartiments techniques" utilisaient des ingénieurs électroniciens,
les "représentances" des techniciens dépanneurs , formés dans des
collèges d'électronique et avec une riche expérience.
Voilà sur la
répartition géographique et professionnelle du réseau dont j'ai dű assurer
la formation.
Le jour de mon engagement , j'ai eu une première
discussion avec le directeur technique. Moi, j'ai avancé ma prédisposition pour
l'apprentissage, lui, il m'a décrit les grandes difficultés qu'il avait à
assurer le perfectionnement continu de son personnel de service.
En somme ses
observations étaient :
- La dynamique du changement des produits de
l'entreprise avait fait apparaître le problème de l'inertie du système
d'instruction, qui n'était plus capable de suivre l'évolution de la production.
- Le type du changement des produits n'étant plus progressif ( on devait
passer souvent à des techniques structurellement nouvelles ), l'ancien modèle de perfectionnement ( mise à jour par intégration au savoir faire
existent des connaissances spécifiques aux nouveaux modèles) ne donnait plus
satisfaction.
- Le département
de l'entreprise qui avait la tâche de résoudre les problèmes du
perfectionnement (appelé département de
l'enseignement) et dans lequel
avaient été engagés des psychologues , des administrateurs et des professeurs
ne réussissaient guerre à s'encadrer dans la réalité de l'entreprise.
- D'autre part, les essais d'utiliser les ingénieurs
qui avaient conçu les produits et qui étaient dans la meilleure posture pour
les expliquer, se sont généralement soldés par des échecs, parce que d'une
part, les spécialistes étaient irrités d'ętre interrompus de leur activité
de recherche et, d'autre part, ils n'avaient pas les prédispositions, les
qualités et les connaissances nécessaires pour enseigner.
- Enfin, pour ce qui était des moeurs dans le réseau
de service, il m'a prévenu que pour des raisons que je me passe de décrire ,
les dépanneurs se comportaient dans le territoire comme des petits rois avec
des clients, qu'ils exigeaient et qu'ils obtenaient des pots de vin pour
intervenir promptement et que cela avait donné au métier des connotations
mafieuses avec tout ce que cela implique! Une partie de ces gains illicites
était destinée à alimenter certains responsables des compartiments
administratifs. Notamment c'était la coutume des bureaux de personnel (qui décidait sur l'engagement)
et d'enseignement (qui décidait sur les caractérisations et les promotions) .
Vue ma stupéfaction il m'a laissé comprendre que le dernier étage de cet
échafaudage fűt plus haut que lui!
Voilà un bel écart ! J'espère qu'on sera d'accord avec
moi que ce n'était pas mal comme situation éloignée du cadre traditionnel de
l'enseignement. J'étais jeune...j'ai pris le pari!
b. Les objectifs et les moyens
Je me suis
engagé à trouver une solution pour :
1. Décrire de manière systémique la situation de la
formation dans l'entreprise. Découvrir les moyens d'intervention.
2. Instruire
les dépanneurs du réseau de service de la manière qu'ils puissent résoudre
les pannes des appareils nouvellement lancés sur le marché, męme
si' ils appartenaient à une nouvelle technique.
3. Organiser
l'instruction de la manière que son coűt soit minimisé et expliciter les
critères de cette optimisation.
4. Chercher la
preuve que les dépenses faites pour instruire produisent des gains plus grands pour l'entreprise , qu'ils sont donc rentables
5. Trouver les
personnes qui correspondent le mieux au profil de la tâche de formation et les
lier dans un collectif , formant un "compartiment de
perfectionnement"
6 Trouver des
moyens pour que l'instruction ait aussi un effet éducationnel , pour assainir
le climat dans l'entreprise, et le comportement envers le client.
7.
Contrecarrer la loi du "pot de vin" qui réglait la pratique
d'embauche et de promotion , par des "coups préparés" dans le cadre
de la formation.
Les moyens que le directeur m'a mis à disposition pour
mettre à bout ce plan ont été:
1. Son appui constant ( de la sorte que j'ai pu opérationnaliser mes
idées; étant donné les obstacles qu'il a dűs confronter, je considère ce point comme déterminant)
2 L'accès à
toutes les donnés pertinentes (statistiques, analyses, notes techniques sur les
nouveaux produits etc).
3. La
possibilité de m'occuper longtemps (5ans) seulement de ce problème
4. Le droit de faire des expérimentations et de
prendre des décisions sur la formation , sans avoir à les négocier avec
d'autres "responsables" (de type politique- administratif- mafieux)
5. La
possibilité de l'immersion dans la réalité des représentances, au milieu des
dépanneurs.
6. Le droit de
choisir des collaborateurs parmi les ingénieurs.
c. Le
développement
ETAPE 1.
Je me suis présenté
à une représentance (de la ville Piatra Neamt) en tant que nouvel
ingénieur- dépanneur. Une année entière je me suis immergé dans le milieu des
dépanneurs, faisant attention aux aspects:
- La relation dépanneur/client
- Les problèmes , les désirs et les types des clients
- Le comportement des produits à l'utilisateur (les
aspects statistiques et techniques des pannes).
- Le déroulement du dépannage (algorithmes, attitudes,
degrés de difficulté)
- Les types des situations de dépannage qui
apparaissaient et les connaissances nécessaires pour les résoudre.
- Les moyens utilisés (instruments, littérature,
coopération)
- Le déroulement des manifestations de
"formation" et la vision des gens sur le perfectionnement
- Le rapport entre les connaissances théoriques et
l'efficacité de dépannage.
- Męme
chose pour l'expérience.
- Les "règles du jeu" qui régissaient les
relations entre les collègues et les rapports avec les chefs.
Suite à cette
"prise de pulse" la grande majorité des idées que j'avais au départ a
dű changer radicalement...
Voilà le genre
d'observations que j'ai faites :
- Dans la relation avec le client ,les dépanneurs
n'étaient pas toujours coupables; ils devaient faire face à des situations
ingrates, absorbant la nervosité des gens, profondément mécontents du
fonctionnement de leurs appareils.
- D'autre part, le fait qu'ils acceptaient (et
exigeaient męme) des pots de vin pour une bonne réparation ,se confirmait.
- On procédait ainsi parce que le salaire était pénible (ils étaient obligés à
"l'arrondir") et parce qu'il
était fixe (chacun était payé
avec une somme qui ne dépendait guerre ni de la quantité ni de la qualité des
réparations).
- Généralement, la rate des pannes était
innadmissiblement grande, les présomptions théoriques ne se retrouvaient pas
sur le terrain .En réalité le compartiment de service devait
"couvrir" la faiblesse de la qualité des produits. Les dépanneurs le
savaient bien. Ils étaient peu disposés à entendre des "leçons" de la
part des techniciens, pour lesquels ils n'avaient pas trop de respect.
- On devait faire face à une véritable avalanche
de pannes, ce qui créait un état permanent de pression, de hâte, une tendance
naturelle vers les solutions superficielles, une allergie à toute suggestion
vers des raisonnements plus profonds.
- Comme
résultat de cette attitude, pas mal de clients payaient (sans le savoir) le
prix des interventions maladroites . Si l'appareil était en garantie, le prix
des pièces inutilement détruites était payé par l'entreprise.
- Dans la plus
grande majorité , les défauts étaient solutionnés par expérience à cause de
leur répétibilité ! Les gens reconnaissaient les cas qu'ils avaient déjà
rencontrés avec une vitesse extraordinaire. Ils s'étaient formé un instinct
professionnel. Pour moi et les autres ingénieurs, obligés à recourir à des
raisonnements, le temps nécessaire pour résoudre des tels cas était incomparablement
plus grand.
Cet aspect a
commencé par m'irriter (il contredisait brutalement mes prémisses sur la source
d'un dépannage efficace). Puis j'ai réussi à le considérer à sa juste valeur.
Je crois qu'en si faisant je me suis
libéré du modèle de l'enseignant.
- Par contre ,
dans les cas difficiles , rares ou nouveaux, les dépanneurs qui fonctionnait
par expérience se bloquaient complètement. C'était le tour des autres (pas
nombreux) qui avaient réussi à se former une logique appuyée sur des
connaissances solides et sur un perpétuel mis à jour. Si des tels dépanneurs
n'étaient pas disponibles (d'habitude on leur répartissait des tels cas) le
spectacle du dépannage était pénible. De plus, on voyait à cette occasion
que la grande majorité des dépanneurs ,
avait perdu tout contacte avec la théorie du domaine et la possibilité de s'y
raccorder.
- Les instruments desquels on disposait pour dépanner
étaient rudimentaires. Les quelques instruments modernes existants n'étaient
pas utilisés parce que les gens n'avaient pas été instruits à le faire.
- La
documentation était assez bonne (cahiers
complets de dépannage, livres publiés,) ,mais elle était toujours en grand
retard (elle arrivait après que les gens avaient été obligés d'apprendre en
tâtonnant sur les pannes rencontrées).
Voilà en grandes lignes les observations contenues
dans le rapport que j'ai conçu après l'immersion.
Les recommandations que j'ai faites ont
été :
1. De corriger la qualité des produits fournis sur le marché.
(on m'a répondu qu'on fait des efforts, mais il y a des restrictions dues à la
technologie utilisée, qui ne peut pas ętre renouvelée parce que...)
2. D'agrandir le salaire des dépanneurs et de le faire
dépendant de leur prestation. (ce genre de mesures n'ont pas pu ętre
prises, parce que...)
3. D'embaucher de nouveaux dépanneurs s'ils font
preuve à la fois d'expérience, de connaissances solides et de... caractère. (ce
genre de mesure n'ont pas pu ętre prises...)
4. De revoir la
structure hiérarchique du réseau , de manière à éliminer les situations absurdes (les chefs nettement
inférieurs professionellement à leurs subalternes) et à dérégler le réseau
souterrain. ( après des âpres combats, on a amélioré la situation)
5. D'enrichir l'équipement technique des
"représentances" et des "compartiments techniques" et de
stimuler l'assimilation du nouvel équipement. (la réaction a été assez
vigoureuse).
6. De tenir
compte dans les sentences sur la situation de la formation et sur la prestation
des techniciens des relations complexes qui existent dans le système représenté
par l'entreprise.
et enfin :
7. De me déléguer pour rédiger un programme
d'enseignement qui corresponde aux vrais besoins de formation , pour écrire les
"cours" en conséquence, et pour organiser les leçons dans le cadre
des représentances à l'aide d'un collectif de jeunes ingénieurs que j'avais
réussi à attirer à l'action.
8 De trouver
des nouvelles solutions (plus expéditifs) aux besoins d'information, de lier la
formation et l'information dans un męme réseau de distribution.
ETAPE 2
Suite à l'acceptation du point 7, j'ai passé à
l'organisation des cours de formation. Cette fois les objectifs
visés étaient :
- de former un groupe de spécialistes dans la
formation (possédant les connaissances techniques, les aptitudes didactiques
et le savoir sur la personnalité de la
"clientèle")
- d'établir dans ce collectif le curriculum, les
moyens et les stratégies appropriés
- de rédiger un programme de perfectionnement et des
cours en conséquence
- d'exposer ces cours, en nous déplaçant à chaque
réprésentance pour explorer l'alternative de l'enseignement "transporté
dans le milieu du travail" et pour pouvoir analyser le feed-back des
dépanneurs.
Parallèlement, notre collectif a attaqué l'organisation
de l'information technique. On visait :
- l'analyse des besoins
- la recherche sur la pertinence de l'utilisation des
moyens disponibles
- une méthode pour que les nouveautés soient
transmises en temps utile
- l'équilibre entre une formation rigoureuse et une
information efficace (vues comme deux vois pour aider la performance)
Les résultats de cette démarche ont été en général
satisfaisants.
- Le groupe c'est formé (il comprenait six
ingénieurs).
- Le programme et les cours ont été rédigé.
- Les leçons ont eu lieu.
- Les premiers "bibliographies" et les informations techniques à jour ont
commencé à ętre distribuées.
Il mérite de
signaler des conclusions-
recommandations qui ont été obtenues:
1 Pour rédiger un bon cours de formation il faut
connaître intimement la réalité avec laquelle se confrontent les coursants.
2. Le rôle d'instructeur demande une spécialisation;
pour le jouer bien il faut avoir
certaines particularités
3. Ils existent des situations pour lesquelles
l'investissement dans la formation (le travailleur sait comment faire) est plus
efficace que celui dans l'information (le travailleur sait ou trouver les
indications pour comment faire), et pour des autres au contraire; un bon
équilibre sur ce choix est un point de base .
4 Les leçons tenus dans le cadre des représentances
ont occasionné des rapprochements intéressants entre les apprenants et les
formateurs et ont été bien reçues parce que commodes pour les dépanneurs..
D'autre part , le coűt du déplacement, l'interruption du programme ,
l'atmosphère et les restrictions d'équipement ont été des contre-arguments.
5. Le fait que les cours ne se terminent pas par un
examen dont les résultats aient une conséquence visible a un effet catastrophique
sur la concentration des apprenants, qui ne sont pas excitables par des autres
motivations. Plus que ça, la manque d'une mesure unitaire ne donne pas la
possibilité de suivre la courbe globale du niveau d'expertise atteint dans
l'entreprise
et enfin :
6. On propose l'organisation des "centres de
formation" dans le cadre des
compartiments techniques régionaux
qui coordonneront à la fois la formation et la distribution de
l'information nécessaire.
Ils utiliseront
des ingénieurs experts en dépannage, spécialisés en instruction, et des
ressources d'enseignement appropriés mises à leur disposition.
Chaque
dépanneur devra participer périodiquement au cours de mise à jour organisés par
ces centres. De plus, à la fin de ces cours, il subira un examen détaillé. Le
résultat de cette évaluation sera un critère incontournable pour la promotion .
7. Les centres
éditeront périodiquement une revue d'information qui contiendra tous les
aspects techniques nécessaires à la solution des pannes pour les nouveaux produits.
8. Les centres
élaboreront un système de questions complet, couvrant toutes les situations
typiques avec lesquelles un dépanneur peut se confronter dans son activité.
Sur cette base
(continuellement mise à jour) se fera le perfectionnement auto didactique des
techniciens, le système des tests utilisé pour les examens périodiques et
l'analyse de l'évolution de la situation des connaissances des dépanneurs.
ETAPE 3
L'offre présentée dans l'alinéa précédent a été acceptée.
J'ai été nommé coordonateur du "compartiment pour le perfectionnement
professionnel" qui avait la tâche de distribuer de la formation et de
l'information de manière à améliorer la performance des dépanneurs. Le
compartiment disposait d'un local est des fonds, il utilisait une équipe
spécialisée d'ingénieurs.
On a développé simultanément les structures
nécessaires pour réaliser les trois volets qui constituaient notre tâche: la
formation, l'information et la vérification, de la manière qu'elles forment une
unité dont on cherchait l'optimisation d'ensemble.
Les "entrés" du système étaient:
- les "demandes de savoir faire" exigés de
la part du réseau de dépannage, exprimés par les départements de conception et
de production .
- les informations techniques nécessaires
- les analyses sur l'activité de service faites par
les compartiments techniques
- la base d'observations sur la situation des
connaissances des dépanneurs.(feed back).
Les "sorties" :
- la rédaction du programme de perfectionnement, de
l'horaire, du guide méthodologique, des cours destinés à présenter chaque
nouveau produit ou à remettre à jour la base des connaissances générales.
- l'organisation des laboratoires et des salles de
cours, et de tous les éléments
accessoires nécessaires au bon déroulement de l'instruction.
- l'instruction proprement dite.
- la revue d'information périodique et les "avis
de mis en garde" sur les nouveautés.
- la conception du système de questionnaires
utilisable pour la vérification des connaissances.
- l'examen systématique du savoir des dépanneurs.
- les analyses périodiques de la situation de la
formation et de la pertinence des moyens
utilisés pour l'améliorer.
Après quelques années de fonctionnement ce système a réussi à atteindre une
performance acceptable, autant sur le plan pratique (l'arrivée des nouveaux
techniques a été absorbée honorablement) que sur le plan structurel (nous
étions devenus capables de répondre de manière organisée à une certaine demande
de propagation de la connaissance et
męme de s'orienter en vue d'une économicité de la solution).
C'était la réponse aux objectifs énumérés au point b),
à part l'estimation globale de la rentabilité. L'expérience acquise nous à
permis de tirer aussi certaines conclusions sur l'efficacité de l'activité de
perfectionnement :
- le coűt du déplacement périodique des
dépanneurs pour suivre les cours de formation dans le cadre du "centre du
perfectionnement" était trop élevé; il était douteux que le gain ainsi
réalisé justifiait des telles dépenses. Ainsi on pouvait craindre que
l'application d'un principe d'autogestion du réseau de service, eűt transformé l'effort de formation
dans un luxe, si on n'aurait pas opéré simultanément des autres modifications
majeures du système!
- on dépensait trop pour palier la manque
d'intéręt de la part des apprenants, pour "innover" toutes
sortes de trucs motivationnels artificiels qui n'arriver pas à remplacer les
motivations naturelles et vigoureuses que les apprenants auraient eu dans un
système économique et social compétitif.
- on payait un
prix énorme pour le refus du principe de la compétence.
En somme, on arrivait à un compromis par
l'équilibration de plusieurs déformations dues au système dans le cadre duquel on
représentait un sous-système. Il n'est pas surprenant donc que, la révolution
de 1989 a secoué profondément notre "centre de
perfectionnement"...
ETAPE 4
Enfin, la révolution...
Les fonds alloués à la formation (dont les origines
étaient inconnues) ont disparu. D'ailleurs toute l'activité de l'entreprise
doit se redéfinir conformément aux nouveaux critères imposés par le libre
marché et la démocratie. C'est la refonte d'un monde.
L'activité courante de notre centre a été
bouleversée. Ca menace d'ętre la
faillite d'un long effort d'organisation.
Mais c'est exactement à ce moment que les investissements structurels doivent
prouver leurs qualités, que le fait de ne nous avoir pas résumé à
"instruire", mais d'avoir cherché des méthodes de design pour
l'instruction dans son contexte systémique, d'avoir pris l'habitude de chercher
l'optimisation à l'aide de tous les moyens disponibles, doit produire ses fruits!
Car, n'importe quels soient les nouveaux donnés et les
nouveaux moyens , on dispose d'une méthode pour les englober dans un nouveau
design.
Ainsi on a commencé à mettre au point des nouvelles
techniques d'information , formation et entraînement, à l'aide des ordinateurs
et de la technologie vidéo (leçons et examens sur disquette ou sur cassette
vidéo) qui promettent une forte réduction des dépenses avec des gains de
qualité!
Aussi on pourra
profiter de la libération des restrictions dues à la malformation
anticompétitive
Et de plus, il y a l'aide de la Technologie de
l'éducation...!
Mais c'est à ce moment
que, pour mois, cette expérience à pris fin!
2. L'analyse de la situation exemple
Je mettrai en évidence les traits caractéristiques de
l'expérimentation décrite antérieurement, ayant toujours en vue l'ensemble des
manifestations de męme genre, de la manière que les propriétés explicitées
puissent refléter l'essentiel de cet ensemble et le décrire synthétiquement.
a L'espace des buts: performance par savoir faire;
dialectique but- moyens
La première observation est que la situation de l'enseignant
(qui doit réaliser une certaine tâche d'apprentissage) ne correspond pas à
celle décrite antérieurement.
Il est évident qu'il a fallu opérer dans un espace de buts caractérisé par certains
liens d'influence et causalité.
Finalement ce
qui intéressait ceux qui nous ont proposé l'intervention étaient la performance du dépannage dans l'entreprise de service .
Plus spécifiquement , on a dű faciliter la
performance par l'intermède du l'accroissement du savoir faire pertinent. Ce moyen a donc été notre but spécifique,
la finalité de notre action.. Pourtant, on n'a pas renoncé à suivre
simultanément les effets de notre activité sur la performance et aussi les
autres éléments pertinents , car toute interférence causale ne pouvait pas
ętre négligée du moment qu'on ne pouvait pas éluder le but ultime.
Ainsi on a tenu compte des relations causales:
- l'influence du savoir faire sur la performance ( en
corrélation avec les autres éléments qui
la conditionnaient )
- l'influence de l'information et de l'apprentissage
et de l'expérience pratique sur le savoir faire (tenant compte de toute
interférence)
- l'influence de la formation , de l'instruction et de
l'éducation (vues comme mécanismes d'enseignement) sur l'apprentissage (vu
comme évolution des connaissances).
Quand j'ai analysé la réalité dans l'activité de
dépannage, (voir surtout les recommandations de l'étape 1) l'attention a été
focalisée plutôt sur les aspects qui déterminent la performance et sur leurs
relations. C'est par analogie la situation d'un chirurgien qui, avant d'opérer,
doit analyser le métabolisme du patient, pour saisir les effets de son
intervention sur l'ensemble. Car en définitive son but immédiat (opérer bien)
n'est qu'un moyen pour le but principal qui est la santé.
Plus tard, (sans jamais oublier la performance), mais
après avoir établi les nécessitées qui devaient ętre satisfaites par le
niveau de savoir faire, on a pu se concentrer sur des objectifs spécifiques au
savoir-faire.
L'étape 2
représente plutôt une recherche à ce niveau, une démarche pour bâtir à la fois
un curriculum et les manières de le réaliser les plus adaptées à la situation
de l'entreprise et à la personnalité des dépanneurs.
A la męme
étape on peut remarquer l'exploration de l'alternative sur les voies
d'intervention, pour agrandir le savoir faire: formation et information.
(mémorisation des informations nécessaires au dépannage sur des supports
externes, facilement accessibles, ou internalisation par apprentissage).
C'est à ce niveau du design qu'on a observé les
différences entre les actions en vue d'apprentissage qu'on devait réaliser
(instruction, formation, éducation) et les implications sur l'organisation des
cours.
Quand on nous
demandait de faire de la sorte que les dépanneurs puissent résoudre rapidement
les pannes des nouveaux produits , męme si' ils le faisaient de manière
mécanique, c'était de la formation et les méthodes étaient en conséquence.
Quand, par contre, on nous demandait d'assurer au
dépanneurs une compréhension logique de ce qu'ils faisaient, de les rendre
capables à se débrouiller seuls dans des
situations nouvelles , par des raisonnements logiques, c'était l'instruction
qui prévalait.
Enfin, diriger
l'apprentissage de manière à stimuler des modifications au niveau des comportements
et des conceptions , s'était de s'attaquer à l'éducation.
C'est au niveau de l'étape 3 (le
centre de perfectionnement) qu'on a pu diriger l'attention principalement sur
l'organisation de l'enseignement , de l'information et de la vérification, proprement dites. On a passé au design des
situations d'apprentissage (leçons, tests, etc). Pourtant , quoi que les
objectifs étaient spécifiquement d'appren-tissage, on a gardé l'attention
réveillée à tout autre facteur externe qui l'influençait.
Enfin , la 4-ième étape aurait dű nous permettre
de descendre encore plus l'échelle causale et de transformer les moyens
utilisés pour gérer l'apprentissage dans des objectifs à optimiser (des buts).
Une fois établie la place des instruments dans la formation (instruction,
éducation), de la formation dans l'évolution du savoir faire (à côté de
l'expérience et de l'information), et du savoir faire dans la performance, on
peut se pencher vers le design des
instruments pour instruire pour savoir pour performer.
En conclusion à ce premier point : l'émancipation du
design pour faire face à une structure
de buts , liés causalement : la
performance via le savoir-faire via l'apprentissage via l'instruction via les
instruments pour instruire.
b) La systémicitè (la vision globale)
On ne saurait insister suffisamment sur l'importance
de la perception de la dimension systémique
de toute réalité analysable . En fait, c'est à mon avis le grand progrès
apporté par la science contemporaine à la pensée et à la pratique. J'éviterais d'insister
sur ce point devenu trivial. (d'ailleurs je l'ai déjà traité extensivement dans
les autres travaux).
Il n'existe pas une activité sérieuse (surtout de
design) qui élude l'obligation de la vision systémique. Pourtant, il est vrai
que la manière traditionnelle de "faire de l'éducation" ne réussit pas à se plier à cette exigence.
(peut ętre à cause de la complexité du système qui est en jeu).
Si on revoit l'exemple proposé on remarquera partout
le caractère systémique du problème à résoudre et de la solution envisagée.
D'ailleurs la systémicitè de la solution est toujours (à mon avis) une réponse
appropriée à la systémicité naturelle et inévitable du problème.
Les
considérations du point précédent (sur l'espace des buts) peuvent ętre
relues pour observer la vision systémique au niveau des buts à atteindre et des
moyens à utiliser. En fait le but est remplacé par un système (espace) de buts.
On n'a pas pu intervenir utilement qu'après avoir mis en
évidence toutes les relations existantes dans le système à l'intérieur duquel
on nous avait demandé de produire des changements.
On a dű observer donc : les besoins des clients,
les caractéristiques des produits à dépanner, les dépanneurs en action de dépannage,
le niveau de leurs connaissances professionnelles et leurs personnalités, les
conditions techniques et les sources d'information qu'ils avaient à leur
disposition, la manière dont ils étaient recrutés, payés ,stimulés, appréciés,
traités par l'administration. Tout cela pour comprendre le système extérieur
dans lequel l'apprentissage fonctionnait inséparablement en tant que
sous-système.
Car, męme si l'action de l'ingénieur est réduite à l'intérieur d'un système, le design
de cette action doit se faire en respectant ce que j'appellerais "les
conditions de compatibilité à la surface" , c'est à dire le respect des
déterminations extérieures.
En s'appliquant
au sous-systèmes représentés par les actions d'apprentissage, on découvre un
nouveau métabolisme systémique. Les instructeurs, les instruments, le cadre,
les notions , les critères , l'influence du passé, ont été autant d'éléments à
suivre et à corréler , pour pouvoir établir de façon organisée et crédible une
méthodologie pour concevoir et soutenir le moment d'instruction.
En plus, l'ensemble de ces moments (pour ne pas
représenter une chaîne aléatoire d'événements) a dű ętre traité en
tant que système d'instruction de
l'entreprise. Cela a réclamé la recherche d'un compromis optimal pour la
distribution de l'effort de formation : sur le territoire, dans le curriculum
et dans le temps!
Dire qu'on a toujours respecté l'obligation de se
tenir à ce modèle d'action ce serait d'exagérer. Pourtant, notre formation
(ingénieurs) nous à naturellement poussé à tenir compte de la situation
systémique et j'espère que la description de notre activité met ce fait en
évidence. Ainsi il devient évident que : la
vision de la démarche est en permanence systémique.
c)Le caractère systématique et généralement
scientifique.
Après avoir analysé tous les éléments qui composaient
le système à modifier, nous avons passé à la deuxième étape qui doit ętre
présente dans toute démarche scientifique
:la synthèse d'un modèle. Le succès
de la recherche d'une solution dépend névralgiquement des qualités du modèle
établi.
Le modèle doit ętre assez élaboré pour tenir
compte des relations importantes.
Le modèle doit ętre assez simplifié pour
permettre la recherche d'une solution.
Le modèle doit ętre isomorphe à la réalité
(pertinent) et ajustable facilement après la confrontation à la réalité
(feed-back prévu ).
Le modèle doit ętre modularisé pour permettre la
solution des sous-problémes ou
l'adaptation aux problèmes semblables
.
Nous avons constamment (systématiquement) cherché l'élaboration des tels modèles et, en si
faisant, nous nous sommes placés dans le cadre de la démarche scientifique.
Je choisirai comme autre exemple le fait d'avoir mis
au point un système unitaire (plus de 10000 questions) de mesure pour le niveau
des connaissances sur les appareils et leurs pannes.
L'étalon, la
mesure et la comparaison validée sont des autres paramètres de la
scientificité. On ne peut optimiser que ce qu'on mesure d'une manière ou d'une
autre...
Aussi je note le remplacement des actions dispersées
d'information et de formation par un programme unitaire de formation et une distribution
régulière et systématisée de l'information, et le remplacement des formateurs
recrutés occasionnellement parmi les ingénieurs de la production par des
ingénieurs formés pour former...
Tous ces changements qu'on a apportés à la structure
de perfectionnement des dépanneurs sont autant des manifestations de
systématicité.
On conclura donc à ce point : la démarche se fait systématiquement selon les normes de la science.
d) L'ouverture dans le choix des moyens
On a vu dans un paragraphe antérieur (et dans
l'exemple présenté) que, la différence qui sépare l'ingénieur de la formation
du professeur classique consiste dans leurs obligations envers le système dans
lequel ils doivent agir.
Le professeur est placé dans un système bien précisé.
Il a une tâche explicite dans un contexte et avec des moyens qu'il ne peut pas
(ou ne doit pas) changer. L'influence du système qui englobe la leçon et des
sous-systèmes que la leçon contient, n'est pas négociable. Tout au plus (s'il
est un bon professeur ou s'il dispose des bons guides méthodologiques) il peut
tenir compte de ces conditions et adapter son discours en conséquence (faire le
design de sa leçon).
Par contre, l'ingénieur de la performance via le savoir faire via l'instruction via les instruments à instruire doit travailler à plusieurs niveaux superposés
, en manoeuvrant entre eux le plan de son design !
Il pourra (ou devra) envisager, exiger et
opérer des modifications du grand système dans lequel l'instruction n'est qu'un
sous système.
Il pourra aussi faire des choix sur les composantes
internes de celui-ci ou, plus que ça , envisager et produire des instruments
destinés à l'équiper.
C'est
à cause de cette "versatilité" que le problème du design des moyens
(choix ou conception) devient pour ce genre d'instructeur un problème de base.
Au fond, comme je viens de le suggérer, la problématique du choix des moyens et
symétrique à celle de la liberté extérieure: on complète le design de base
(dans le plan de la leçon) et le macrodesign (dans le système de l'extension
pertinente de la leçon) avec un microdesign (dans les sous systèmes représentés par les moyens).
Dans le cas que j'ai présenté (et vécu) cette
"intradimension" peut ętre ressentie partout. Ainsi j'ai été
mandaté à choisir entièrement l'ensemble des moyens à utiliser pour instruire
(évidemment dans l'espace des possibilités). Plus que ça, étant donné le
constat que les moyens dont on disposait étaient inadéquats , et leur
utilisation réduisait dramatiquement les chances d'un résultat acceptable, j'ai
dű passer à une activité intense de "microdesign" , en mettant
au point les instruments qu'on a utilisés plus tard pour instruire : banques de
donnés, système d'information, laboratoire, cours etc.
Pour synthétiser ce point : le
design doit immerger au niveau des moyens.
e La recherche de la matrice productive et de la
reproductibilité.
Après avoir mis au point un cours et l'avoir enseigné
en se déplaçant à chaque centre (voir l'étape 2) on a senti le besoin de mettre
au point... la mise au point des
cours et l'organisation de l'enseignement.(étape 3)
Après avoir vérifié artisanalement le niveau des
connaissances, on a senti le besoin d'agrandir la productivité du mécanisme de
vérification et on a construit le système des questionnaires.
Après avoir utilisé le système des questionnaires
publiés, on a passé à son introduction dans l'ordinateur et à l'évaluation
à l'aide de celui -ci.
En général, le passage de la concentration pour faire,
à la concentration pour se préparer pour faire, représente ce qu'on considère
typique pour l'attitude technologique.
L'inspiration se déplace de l'étape de production vers
l'étape de design (ce qui crée pour ceux qui se trouvent dans des positions
d'exécutants, l'impression (justifié ...) de sa disparition . En fait, la
satisfaction de la liberté de création est redistribuée, car le point
d'application de l'imagination est déplacé vers
un stade oů elle est , à la fois, plus difficile est plus
productive. C'est le prix à payer...
Une dernière caractéristique : on se propose de produire des systèmes qui vont produire de
l'instruction de manière reproductible.
3. La première définition (synthétique )
Les traits caractéristiques mises en évidence au par 1
pour l'expérimentation décrite au par.2 peuvent ętre retrouvés dans
maintes autres situations de la nouvelle réalité pour la description de
laquelle a était destiné le cours qu'on
vient de suivre. Je ne donnerai donc pas
des autres exemples à l'appui de l'affirmation que les propriétés mises
en évidence forment une description synthétique de l' ensemble des
manifestations pratiques et des préoccupations théoriques qu'on nous à invités
à définir.
En plus de son
corps, la définition doit contenir le
nom choisi pour symboliser l'ensemble défini.
Or, c'est justement au niveau du nom
que se situe la source de ce que je considère une limite de la démarche
de conceptualisation qui nous a été
présentée. (je reviendrai). C'est pour cela que j'évite l'utilisation du nom
standard :"technologie de l'éducation" (autrement mon point de vue ne
pourra pas ętre clairement perçu).
Je laisserai le choix du nom pour plus tard en
formulant la première définition ainsi:
DEFINITION 1
La ........... est le domaine d'étude théorique et
d'activité pratique destiné à orienter,
respectivement à réaliser, le design des systèmes voués à ....<la performance; l'instruction; l'éducation
etc...>..... en vue de leur
optimisation.
Elle utilise une vision
systémique généralisée , en élargissant la recherche de l'optimalité sur toutes
les dimensions qui la conditionnent. Ainsi le design opère aussi dans l'espace des
buts que dans le choix et la conception des instruments.
Elle
respecte les principes généraux de la science (systématisme, vérification de la
pertinence des modèles, appel à la mesurabilité, etc) et se concentre sur leur
opérationalisation efficace et
reproductible.
Observation:
Les points peuvent ętre remplacé par exemple par
"la technologie de l'instruction" ,
respectivement "l'instruction", pour obtenir la définition que
le travail attend probablement
4. La deuxième définition ( par particularisation
fonctionnelle)
Je crois, qu'en lignes générales, la définition que je
viens de proposer correspond aux plusieurs définitions qu'on a analysées
pendant le cours. Une telle définition reflète la genèse du domaine ( son
histoire est une synthèse ascendante ,plutôt qu'un procès de particularisation
théorique du concept de la technologie ). Il n'est pas dans mon intention
d'infirmer le mécanisme historique qui à dévirtualisé le domaine et l'utilité
des définitions synthétiques auxquels on est arrivé.
Ce que j'avance est l'observation qu'on peut franchir
une nouvelle étape: le raccord à l'ensemble (le "dictionnaire")
scientifique. J'avance aussi la suggestion de le faire, au prix d'une
réévaluation de la définition, pas
seulement par souci d'unité globale de la science(j'admets que les maths m'ont
donné l'obsession des structures...) ,mais pour les gains que cette
reconsidération peut apporter au développement ultérieur du domaine.
Je regarde la
définition précédente (et celles analogues présentés dans le cours dans
lesquelles on retire aussi le syntagme "technologie de l'éducation")
comme une devinette...!
Qui est le
domaine systématique et systémique qui utilise tout les instruments, les
résultats de la science et de la recherche pour trouver des solutions optimales
pour un certain problème pratique?
Qui est le
personnage qui correspond à la définition -devinette 1, indifféremment de la
valeur de la variable qu'elle contient (le spécifique particulier du système à
optimiser) ?
Ça ne peut
ętre que la technologie. D'oů en découle la définition :
DEFINITION 2
La Technologie (de ... ) est le domaine d'étude théorique et
d'activité pratique destiné à orienter,
respectivement à réaliser, le design des systèmes (voués à ... ) en vue
de leur optimisation.
Elle utilise une vision
systémique généralisée , en élargissant la recherche de l'optimalité sur toutes
les dimensions qui la conditionnent. Ainsi le design opère aussi dans l'espace
des buts que dans le choix et la conception des instruments.
Elle respecte les principes généraux de la science (systématicité,
vérification de la pertinence des modèles, appel à la mesurabilité, etc) et se
concentre sur leur opérationalisation efficace et reproductible.
On se trouve évidemment en face d' une des
alternatives possibles pour la définition de la technologie, mais on sent quand
męme qu'il s'agit de la technologie (d'ailleurs le nom choisi est loin de
le contredire). Je doute que l'évolution du débat sur la signification de la
"technologie" suivra un chemin divergent de celui sur "la
technologie éducationnelle".
De ce point de
vue , la discussion risque la stérile découverte de la banalité. Je crois plutôt que le débat sur la définition
de la technologie auquel se livrent les théoriciens de la technologie de
l'éducation est une prise de conscience contorsionnée de la possible
technologisation de l'instruction, une forme d'inertie subtile , une manque de
courage de la part des pionniers (à ce sujet je partage l'opinion de Heinich).
Comme ingénieur j'ai eu aussi l'impression que ce
débat sert plutôt à se familiariser avec la technologie qu'à la définir.
L'apparition d'une technologie de l'éducation est une
incontestable naissance (le fait de pouvoir envisager une technologie de la
politique n'implique pas son existence).
Mais son cadre était déjà préparé ( comme le cas d'un
nouvel élément dans le tableau de Mendeleev...). Ça peut paraître frustrant pour ceux qui ont
fait, à partir des expériences pratiques nouvelles dans l'instruction ,l'effort
de synthèse qui les a menés à redécouvrir le concept de technologie, mais se
serait dommage de ne pas dépasser ce point pour jouir de l'unité offerte par
l'isomorphisme de nos expériences
Je trouve d'ailleurs que , si on regarde plus
attentivement l'histoire des manifestations qui ont porté le domaine au stade
actuel on peut observer des moments dont la source d'inspiration a été
exactement l'application des procédures technologiques des autres domaines ,
dans l'éducation.
C'est le cas de l'expérience que je viens de décrire,
car se serait illusoire de croire que, le fait que notre groupe chargé à faire
de l'instruction était formé d'ingénieurs et que le cadre de notre
intervention était une entreprise
technologisée, n'ont pas influencé
directement notre tendance vers une technologisation de l'instruction.
Ainsi j'ajouterais comme définitions du nouveau
domaine:
DEFINITION 3
La
.......... est l'application de la technologie à........
Il est maintenant évident le motif pour lequel j'ai
évité de choisir le nom du domaine. Si j'avais choisi un nom de genre (ce n'est qu'un exemple! ) : La Formatique, les deux définitions auraient été
opérationnelles :
D1: La Formatique est le domaine
d'étude......//...reproductibilité.
D3: La Formatique est l'application de la
technologie à la formation.
Il est évident que la première définition n'aurait pas
eu trop à souffrir tandis que la deuxième
est manifestement la consignation d'une équivalence notionnelle .( genre
: "le triangle est le polygone à
trois cotés"). Pourtant , si on accepte la définition de la technologie
(2) les définitions précédentes deviennent équivalantes. !
Pour ne pas perdre la richesse informationnelle de la
définition - synthèse de propriétés, on pourrait choisir l'alternative de
définition par la succession:
D3. La
Technologie (de ... ) est le
domaine.....// .... reproductibilité.
D2.
La Formatique est la technologie de la formation.
D4.
L'Instructique est la technologie de l'instruction.
D5.
La Performatique est la technologie de la performance.
L'utilité d'une telle formule est fort discutable. Il
semble évident que ce qui est vraiment essentiel pourrait ętre formulé
ainsi :
DEFINITION (variante finale proposée)
1. L'instruction est.....
L'éducation est...
La
performance est...
2. La
Technologie (de x) est le domaine d'étude théorique et
d'activité pratique destiné à orienter,
respectivement à réaliser, le design des systèmes (voués à x) en vue de
leur optimisation.
Elle utilise une vision
systémique généralisée, en élargissant la recherche de l'optimalité sur toutes
les dimensions qui la conditionnent. Ainsi le design opère aussi dans l'espace
des buts que dans le choix et la conception des instruments.
Elle respecte les principes
généraux de la science (systématicité, vérification de la pertinence des
modèles, appel à la mesurabilité, etc) et se concentre sur leur
opérationalisation efficace et
reproductible.
3. La variable x de la définition précédente
peut prendre (parmi autres valeurs traditionnelles) les valeurs:
x= "l' instruction ( consignant
l'existence d'une technologie de l'instruction)
x= "l'éducation" (consignant
l'existence d'une technologie de l'éducation)
x= "la performance"(consignant
l'existence d'une technologie de la performance)
etc
La solution proposée évite la manque de consistance
des sentences comme D4, D5,D6 ou le pénible qu'on aurait éprouvé en choisissant
le nom standard pour le domaine, ce qui nous aurait conduits à "La
technologie de l'éducation c'est ...la technologie de l'éducation".
D'autre
part elle souligne la réductibilité
conceptuelle du domaine à l'application de la fonction "technologie"
à la variable "instruction" dans le sens qu'on choisit pour ces deux
concepts ! On garde la liberté de suivre de manière convenable
l'évolution de ceux-ci, mais dans le męme temps l'avantage de rester avec
elles en relation structurelle précisément définie.
Il reste à voir les avantages pratiques d'une telle
solution.
5. Utilité de la définition proposée
Si on revoit le chemin qu'on a parcouru on constate
qu'on a commencé par décrire une situation en énumérant les éléments qui la
composent (points 0,1 ), puis on a trouvé les traits caractéristiques qui
peuvent la définir synthétiquement (points 2,3) pour finir par l'exprimer par
composition à l'aide des concepts déjà existants (point 4).
Le premier gain d'une telle procédure est celui de
l'abstractisation. En fait, on applique un des instruments d'une
"technologie de la conceptualisation" qui vise la "productivité
intellectuelle" assuré par l'abstraction, l'analogie, et la structure.
Comme un
premier exemple je prends la clarification apportée par la perception de
l'aspect "fonctionnel" de la technologie sur le dilemme du nom du domaine (s'il s'agit d'une technologie
de l'instruction ou de l'éducation ou de l'apprentissage)! Il est évident (dans la perspective
présentée) que le problème est mal posé car il y a autant des technologies de ( ) que de champs d'application de ces
technologies!
Plus important encore, on doit s'attendre que
l'application ferme de la définition
générative révélera des autres éléments, qu'on n'avait pas saisi lors de l'ensemblage
duquel on est parti. (Je n'oublie jamais le cas de la planète découverte par
déductions...) Et je parie (comme Heinich) que ça sera le cas, car une telle
vision comporte un changement d'attitude , une position encore plus ouverte à
l'innovation, plus solidement encrée à l'esprit technique contemporain.
Car si on cherche systématiquement à adapter
au cas de l'instruction (par translation et peut ętre, męme par
morphisme! ) les stratagèmes technologiques établis par l'expérience des autres
technologies , on pourra avoir des paisibles surprises sur le côté pratique !
J'insiste que
je ne parle pas seulement des transferts au niveau des instruments mais aussi
au niveaux des techniques , méthodes et principes.
Pour revenir finalement à mon expérience, je veux
préciser que, le fait d'ętre avisé
sur l'existence de la "technologie de l'instruction" , en tant que domaine enregistré officiellement
(au-delà de la formule adoptée pour le définir) serait très important si
j'aurais l'occasion de revenir à la continuer.
Cette
légitimité professionnelle m'a beaucoup manqué autrefois, et je suis persuadé
que, si j'avais été considéré (par les autres et par moi- męme)
"ingénieur de l'instruction" avec le respect pour la spécificité de
cette difficile posture, j'aurais été plus content et plus efficace.
Le changement majeur que cette prise de connaissance
sur le domaine apporterait ,si je devrais revenir à mon centre de
perfectionnement des dépanneurs..., serait de savoir que je peux faire recours
à une base d'orientation (théories, modèles d'intervention etc) spécifique à la
situation d'un technologue de l'instruction.
Aussi je chercherais l'optimisation de mes méthodes
d'optimisation. Car j'ai saisi le risque que les efforts pour la recherche de
l'économie entraînent des dépenses plus grandes que les économies qu'elles
apportent !
Or ,en si
faisant je dépasserais la phase artisanale de mon activité, en renonçant aux
satisfactions "esthétiques" qui l'ont accompagnée pour l'avantage
d'économiser des énergies utilisables à des autres buts. Car le seul système duquel je ne me suis pas encore
occupé systématiquement ...c'est moi- męme.